Petit tour d'horizon de la musique brésilienne actuelle (6)
Publié le 6 Mars 2013
Nouvel épisode de ces petites sélections de musique brésilienne d'aujourd'hui. Déjà six billets sur ce thèmes et toujours des merveilles à vous faire partager.
Cet épisode vous présentera quelques perles de la musique indépendante du Pernambuco et de São Paulo, puis un tour d'horizon des dernières évolutions du funk carioca, aussi connu hors du Brésil sous le nom de baile funk.
Alessandra Leão, une formidable artiste du Pernambuco dont je m'étonne de n'avoir toujours pas parlé puisqu'elle fait partie de mes artistes préférées de la nouvelle scène du Pernambuco (à côté de Siba, le Cordel do fogo encantado, Mombojo...). Après avoir joué dans le super Comadre Fulozinha et un non moins super premier album Brinquedo de Tambor, son dernier album Dois Cordões est sans doute le plus abouti. Il mêle la guitare de Caçapa à deux autres guitares, portées par des passionnantes percussions des terreiros de Xangô (pandeiro, caxixis, talking drums, güiro, ganzá...). Et bien sûr, la voix d'Alessandra Leão!
Alesandra Leão - Boa Hora (Dois Cordões, 2009)
Son mari et partenaire musical Caçapa, était responsable des arrangements de guitares sur Dois Cordeis. Il a sorti un album également excellent. Superbes morceaux instrumentaux construits autour de riffs de guitares spéciales (viola dinamica) qui entremêlent des mélodies. Un travail sur la polyphonie inspiré tant par la musique érudite européenne (contrepoints et fugue) que par la polyphonie africaine, par lequel Caçapa poursuit la recherche déjà développée sur l'album d'Alessandra Leão.
Caçapa - Coco Jojão n°01 (Elefantes na rua nova, 2011)
José Paes de Lira dit Lirinha, l'ancien charismatique poète-chanteur du célèbre et si unique Cordel do fogo encantado, a sorti un album solo assez déconcertant. Lirinha troque la guitare sèche et les percussions massives du Cordel pour un album plus électrique, plus intimiste aussi, où il fait la part belle aux pianos et synthétiseurs. Mais c'est encore une fois magnifique, abouti et singulier.
Lirinha (José Paes de Lira) - Ah, se não fosse o amor (Lira, 2011). Album offert ici.
La scène de São Paulo, clairement la plus créative du Brésil ces dernières années est notamment portée par l'auteur-compositeur-interprète Rodrigo Campos, dont on avait salué ici son dernier album Bahia Fantastica. Ici un extrait de São Mateus Não é um Lugar Assim Tão Longe.
Rodrigo Campos - Rua Três (São Mateus Não é um Lugar Assim Tão Longe, 2009)
Rodrigo Campos qui a d'ailleurs joué... avec Kiko Dinucci (et Romulo Fróes) dans le super groupe Passo Torto. Kiko Dinucci sur lequel nous revenons sans cesse et qui nous a justement offert deux magnifiques courts albums cette année avec Thiago França. L'un où ils revisitent le thème Ngoloxi dans la veine de leurs titres d'une grande spiritualité, à la fois profondément afro-brésilien (umbanda) et paradoxalement dénué de percussions. L'autre où les deux musiciens s'associent avec le batteur Sergio Machado pour revister certains morceaux de leur répertoire et laissent voir le côté plus "auteur-compositeur" de ces musiciens.
J'allais oublier, les albums sont comme d'habitude en téléchargement gratuit ici.
Voici enfin quelques vidéos qui illustrent les nouvelles mutations du baile funk ou funk carioca, ce genre électronique issu des quartiers pauvres de Rio qui rappelle le rap américain dans l'esprit, mais avec une esthétique tout à fait propre et une histoire de plus de 20 ans!
Sans doute le tube du carnaval 2013, un funk festif et sans prétention, une invitation à la danse assez irrésistible avec les paroles qui décrivent les mouvements à faire pour l'accompagner. Peut-être le tube de l'été chez nous dans quelques mois?
MC Federado e os Lelekes- Ahhh Le le ke lek lek lek (2012)
Le baile funk qui cartonne aujourd'hui se fait souvent bien plus sexuel et vulgaire. Un exemple avec ce titre assez explicite, porté par un gamin encerclé de femmes qui doivent faire deux fois son poids. Il est toujours amusant de voir que les canons de beauté brésiliens sont assez différents des français, avec des seins et des fesses qui se doivent d'être plus généreux mais aussi des jambes qui se doivent d'être musclées.
Mc Magrinho - Empurra Empurra lá na treta (2012)
Le funk ostentação, dont parle très bien notre érudit camarade de blog Olivier Cathus, qui fait l'appologie de l'argent et de la consommation comme dans le rap américain ou français, à base de name dropping et de clips clinquants mais parfois avec beaucoup de style. Un titre emblématique et qui annonce bien la couleur avec ce Felicidade é ter dinheiro. Traduction: le bonheur c'est avoir de l'argent.
Enfin, le funk conscient qui rappelle les premières heures du funk carioca, avec ce titre assez poignant, un peu mélo, de MC Daleste, sur un gamin qui tombe dans le crime, et l'impuissance et la détresse de sa mère.
MC Daleste - Mãe de traficante (2011)
Pour conclure ce billet, un tour au nord du Brésil, dans l'état du